Un député et 5 autres personnes interpellés pour trafic d’ivoire / L’affaire placée en instruction

Six présumés trafiquants opérant dans le commerce illégal d’ivoire ont été interpellés dans un hôtel, à Abidjan, dans la commune de Marcory. C'était le dimanche 31 octobre 2021, alors qu'ils s’apprêtaient à écouler la marchandise. Ils ont été déférés devant le tribunal de 1ère instance d’Abidjan-Plateau, le vendredi 5 novembre 2021.

Ces hommes ont été arrêtés avec en leur possession 11 défenses d’ivoire pour une masse de 37,6 kilos. Cette arrestation est le fruit de la collaboration entre l’Unité de lutte contre la Criminalité Transnationale Organisée (UCT), le ministère des Eaux et Forêts (MINEF) et Eagle Côte d’Ivoire, dont ils ont bénéficié de l’assistance technique. Toutefois, cette opération a connu quelques péripéties due à l’intervention inattendue d’une bande armée de fusils d’assauts affirmant appartenir à la section enquête du Centre de Coordination des Décisions Opérationnelles (CCDO).

Les quatre personnes arrêtées en flagrant délit de détention et de commercialisation de pointes d’ivoire à Marcory sont spécialisées en la matière. Ils ont été interpellés au moment où ils entendaient procéder à la vente desdits ‘’trophées’’ de chasse. Les ivoires saisis proviendraient essentiellement du Burkina-Faso, pays voisin à la Côte d’Ivoire. Un fait qui soulève la grande question de la porosité des frontières terrestres. C’est en début de matinée de ce dimanche que les hommes de l’UCT et ceux du MINEF, avec l’appui technique de Eagle-CI, une ONG spécialisée dans la lutte contre le trafic des espèces protégées sont arrivés dans l’hôtel où étaient retranchés les trafiquants avec les ivoires.

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L’assaut a été mené au moment où les trafiquants s’apprêtaient à écouler la marchandise. Au total, 6 personnes ont été arrêtées dans l’hôtel en essayant de vendre les 11 pointes d’ivoires d’éléphant. Trois d’entre elles, ont été interpellées dans la chambre avec en leur possession, les pointes d’ivoire, tandis que leurs complices, 3 hommes parmi lesquels un ancien député, l’ont été au restaurant de l’hôtel et à la réception.

L’opération d’arrestation a rapidement été perturbée par l’arrivée d’une bande armée de fusils d’assauts et vêtus de gilets par balle. Ceux-ci sont arrivés sur les lieux et ont essayé d’empêcher l’UCT d’effectuer leur travail. Ces hommes n’avaient ni ordre de mission, ni uniforme ou signe distinctif pour identifier leur corps. Ils ont affirmé appartenir à la section enquête du Centre de Coordination des Décisions Opérationnelles (CCDO), une force mixte de lutte contre la criminalité urbaine composée de policiers, de gendarmes, de militaires et de personnels civils. Ces derniers, ont dit être en train d’enquêter sur un supposé trafiquant d'ivoire qu'il voulait appréhender.

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L’UCT ne s’est pas laissé impressionner, car elle a mis 4 suspects dans leur véhicule ainsi que les ivoires. Les 2 autres suspects, qui se sont identifiés comme des éléments des forces de l’ordre, n’ont pas pu être interpellés par l’UCT. L'un a été interrogé et l'audition du 2ᵉ devrait suivre. La suite de l'enquête fera la lumière sur le rôle de ces hommes armés, leurs corps et leur identité afin d’appréhender le but de leur présence. En attendant, les présumés trafiquants ont étés conduits au siège de l’UCT à Abidjan pour être gardés à vue et subir un interrogatoire. Ils ont été par la suite déférés devant le tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau, le 05 novembre 2021 pour trafic illicite d’ivoire puis placés sous mandat de dépôt. L’affaire, quant à elle, a été placée en instruction.

Les prochains jours, les suspects seront présentés au juge d’instruction pour être entendus dans l’optique d’éventuelles enquêtes. Si les présumés trafiquants sont reconnus coupables, ils risquent une peine de prison allant de 3 à 12 mois assortie d’une amende comprise entre 3000 et 300.000 Fcfa. Faut-il le rappeler, la loi faunique ivoirienne est loin d’être dissuasive alors que la situation des espèces protégées est de plus en plus alarmante, notamment celle des éléphants, tués pour leurs ivoires. Pour le cas actuel, sachons que pas moins de 6 éléphants ont été tués pour avoir ces 11 pointes d’ivoires. Le commerce international de l’ivoire est déclaré illégal depuis 1989, mais les populations d’éléphants d’Afrique continuent de décroître.

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Chaque année, 20 000 à 30 000 éléphants sont tués pour leurs ivoires, selon le Fonds mondial pour la nature (WWF) ; équivalent entre 50 à 80 individus par jour. L’espèce ne compte plus que 415 mille pachydermes en Afrique, contre 3 à 5 millions au début du siècle dernier. En Côte d’Ivoire, ce sont plus de 1139 qui ont été dénombrés dans 26 habitats, selon les rapports réalisés entre 1987 et 2000. Aujourd’hui le nombre d’individus ne dépasse guère les 300 selon un rapport de l’Union International pour la Conservation de la Nature (UICN) publié en 2016.

Deux grands facteurs sont considérés comme étant la cause de cette baisse drastique de l’effectif des éléphants : d’une part, l’accroissement du trafic illégal d’animaux lié à la forte demande internationale de l’ivoire et d’autre part, l’exploitation abusive des ressources naturelles nécessaires aux éléphants du fait de l’agriculture industrielle et des occupations anarchiques de leur habitat. Le commerce illégal de défenses d’éléphant est malheureusement en constante augmentation et pèse 3 milliards de dollars (soit près de 2000 milliards de franc CFA). Le principal marché est l’Asie du Sud Est, avec la Chine et le Vietnam comme principaux acheteurs.

Source: Afriquesur7

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