Interview / Après le MASA 2022, Jean-Yves Cebon rassure sur l’avenir du Zouk en Côte d’Ivoire
- Publié le 23, mar 2022
- ARTS - CULTURE & DIVERTISSEMENT
Bercé par la musique depuis son enfance, Jean-Yves Cebon est l’un des rares artistes ivoiriens à avoir exploité le zouk avec succès. Il débute sa carrière juste après l’obtention de son Baccalauréat. Auteur, compositeur, chanteur, interprète et producteur, sa notoriété a connu un boom avec des titres comme ‘’métamorphose’’, ‘’Pas possible ce soir’’, ‘’Le Durcisseur’’, et bien d’autres qui tournent autour de l’amour. La musique, dit-il, c’est ma passion. Infos d’Ivoire est allé à sa rencontre pour vous. Il aborde plusieurs questions : sa carrière musicale, l’origine et le repositionnement du zouk, son passage au MASA 2022… Interview !
Qu’est-ce qui vous a poussé à la musique ?
Comme tout jeune garcon, pendant notre enfance, on aimait beaucoup de choses, la musique, le RAP, on aimait pleins d’artistes. Moi j’aimais beaucoup d’artiste antillais comme Francky Vincent, Jean-Michel Rotin et pas mal d’artistes. Et puis j’écoutais beaucoup de musique slow de Mickael Jackson. Avec les amis, on avait en projet de faire de la musique et finalement je me suis introduit seul parce qu’apparemment les choses étaient plus fortes dans mes germes.
Pourquoi avoir choisi le style zouk comme genre musical ?
Je pense que c’est en rapport avec ma personnalité. C’est vrai qu’à l’intérieur, je suis quelqu’un de nerveux mais je suis très doux, très sensible. Et comme la musique zouk est une musique qui fait absolument appel à la sensibilité, je pense que c’est naturellement que je me suis, petit à petit, rapproché de cette musique surtout avec l’avènement des antillais tel que le groupe Kassav. Egalement, avant d’arriver à l’université j’écoutais déjà du zouk, et étant en lettres modernes, on faisait ce qu’on appelle la littérature antillaise, et tout ça nous a rapproché davantage des îles.
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Dites-nous un peu plus sur le zouk.
La musique zouk, c’est une musique née d’esclaves qui ont été déportés d’Afrique et qui se sont retrouvés sur toutes ces îles dans les Antilles. Et qui, dans leurs musiques, jouaient des instruments comme les gros tam-tams, on pourrait dire que cela s’apparentait au blues. C’est pratiquement la même chose, sauf que ce sont les noms et les langues qui ont changés et c’était des choses qui étaient purement traditionnelle. C’est surtout avec l’avènement du groupe Kassav qu’on a commencé a parlé de zouk. Parce que chez les Antillais, quand ils disent on va faire un zouk, c’est comme s’ils disaient, on va faire une fête, un petit show. Dans un zouk, on joue la musique, on chante et ce sont des chansons qui font référence à la vie des esclaves. Donc les véritables créateurs de la musique zouk, c’est le groupe Kassav.
Vous parlez de musique d’esclaves, mais on constate que cette musique parle beaucoup d’amour. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Oui, parce que dans les débuts, les chansons des esclaves faisaient pitié. Mais vous savez que tout ce qui se rapporte à la sensibilité nous rapproche fortement de l’amour. Si vous avez l’habitude de chanter des chansons qui font pitié, forcément par rapport au chagrin d’amour et autres, vous aurez toujours des thèmes qui se rapprochent de l’amour. Quand vous voulez parler de ce genre de musique maintenant, c’est vrai, ça été peut-être un réflexe. Tous ceux qui ont commencé à faire du zouk, à partir des premiers faiseurs de zouk, n’ont fait que s’inspirer de leurs devanciers qui ont chanté l’amour. Parce que cela se rapporte plus à la rythmique, et nous tous qui avons suivi, nous nous sommes laissés entraîner.
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Pensez-vous que le zouk à sa place dans l’univers musical ivoirien qui est influencé par le Coupé-Décalé, le Zouglou et depuis un moment par le Rap Ivoire ?
Par expérience, j’ai commencé très jeune et j’ai vu l’évolution de la musique de manière générale. Toutes ces mesures sont des choses qui sont promues et qui sont développées avec des stratégies. Je peux vous parler de la façon dont le Zouglou a été imposé aux ivoiriens dès sa naissance à partir de 1990. Il faut reconnaitre qu’à un moment donné de la vie, dans le paradigme musical ivoirien, il y avait de grands concerts de zouk qui s’organisaient en Côte d’Ivoire. Et c’est à partir de la Côte d’Ivoire que Kassav a commencé à devenir très puissant, le plus grand, important et premier concert de Kassav s’est fait en Côte d’Ivoire. C’est pour dire que c’est une question de promotion, de volonté. Dès lors que des personnes seront portées vers la promotion du zouk les choses se mettront en place. Pour l’instant on essaie de s’adapter jusqu’à ce qu’il y ait un gros vent qui réimpose le zouk.
Que comptez-vous faire pour réimposer le zouk en Côte d’Ivoire ?
Moi, j’ai ma petite stratégie qui est toute simple et il s’agit de faire des showcase avec mon orchestre, des petites productions dans des salles de 200, 300 personnes. Cela permettra aux fans de zouk d’être toujours en contact avec cette musique, afin de lui redonner vie et pour cela je travaillerai jusqu’à ce que le zouk retrouve ses lettres de noblesse en Côte d’Ivoire, de sorte qu’on puisse se retrouver dans les grandes salles avec de grandes stars du zouk.
Quels ont été vos titres à succès ?
J’ai eu pas mal de titre à succès. Mais je pourrai vous parler de mon premier titre qui m’a révélé au public ivoirien, c’était ‘’métamorphose’’ qui est sorti en décembre 1993 sur l’album ‘’Start of legend’’, le titre ‘’Dolce vita’’, et ce qui a marché le plus jusqu’à aujourd’hui c’est l’album ‘’Le durcisseur’’ avec des chansons comme ‘’Etre aimé par quelqu’un’’, ‘’On sait faire çà’’, ‘’Le durcisseur’’ lui-même avec la participation de Soum Bill et d’autres artistes. Aussi à 22 ans j’ai sorti un single qui se nomme ‘’L’amour incarné’’.
Que retenez-vous de votre passage à la 12ème édition du Marché des Arts et du Spectacle d’Abidjan (MASA) 2022 ?
Premièrement, c’est une certaine satisfaction. Un espoir qui m’a rassuré qu’effectivement les fans de zouk et de Jean-Yves Cebon, il en existent encore beaucoup. Cela m’a fait plaisir et puis ce qui devient pesant, c’est que j’ai réalisé que les gens m’espèrent, les gens m’attendent. Donc ça veut dire tout simplement que je dois trouver du temps pour monter des projets à proposer aux mélomanes.
Quel est votre actualité ? A quoi doit s’attendre le public ivoirien ?
Mon actualité récente, c’est le MASA à partir duquel nous sommes en train de prendre de nouvelles attaches pour participer à des festivals. A côté de cela, je travaille en studio avec des arrangeurs pour sortir un nouvel album qui sera disponible très bientôt.
Quel sera le contenu de cet album ?
Ce qu’il faut déjà retenir, c’est qu’en plus de chanter en français, anglais, espagnol, il faudra s’attendre à Jean-Yves Cebon dans sa langue maternelle N’zima sur du zouk.
Quels conseils donnez-vous aux jeunes qui désirent ou qui s’intéressent au zouk et qui peinent à décoller en Côte d’Ivoire ?
Je leur dirai de regarder les autres qui font les autres rythmes, s’ils devaient se comporter comme eux, les autres rythmes n’auraient pas survécu. Cela veut dire que si vous êtes passionné de quelque chose, il faudra s’y mettre à fond. Et donc si tu es un faiseur de zouk, fait les choses de la manière la plus intéressante possible et le reste viendra.
Quel est votre mot de fin à l'endroit des mélomanes ?
Merci à ceux et celles qui sont venus me voir au MASA. Je leur demande de croire et d’espérer en moi. Je tiens à les rassurer que je suis en train de faire tout ce qu’il faut pour que dans les prochains mois, je sois le plus régulièrement sur les scènes pour leur plus grand plaisir.
Par Toussaint Konan